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5 septembre 2023 2 05 /09 /septembre /2023 07:11
RDC : VERS LA LEVEE PURE ET SIMPLE DE L'ETAT DE SIEGE DANS LE NORD KIVU ET L'ITURI

Les autorités de la République démocratique du Congo (RDC) doivent lever immédiatement l’état de siège, comparable à un état d’urgence, en vigueur dans les provinces du Nord-Kivu et d’Ituri depuis deux ans, car il viole la Constitution du pays et le droit international relatif aux droits humains.

« L’état de siège est illégal et contribue à aggraver la situation des droits humains dans le pays. Le président Félix Tshisekedi doit lever cette mesure répressive sans délai, a déclaré Tigere Chagutah, directeur régional pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe à Amnesty International.

« Son application et ses multiples prorogations, qui restreignent les droits, sont loin de respecter la Constitution de la RDC et ses obligations internationales en matière de droits humains. »

L’objectif déclaré de l’état de siège était « d’améliorer rapidement la protection des civils, de neutraliser les groupes armés et de rétablir l’autorité de l’État ». Toutefois, la situation en matière de sécurité dans les deux provinces s’est considérablement dégradée. Dans la région, depuis deux ans, on constate [1] une recrudescence des attaques contre les civils et une augmentation des victimes civiles.

Pourtant, le gouvernement a prorogé plus de 50 fois l’état de siège, sans aucun véritable débat public sur la légalité ou le fond de ces décisions.

« Si le président Félix Tshisekedi ne lève pas l’état de siège aujourd’hui, après deux ans de restrictions illégales et injustifiées imposées aux droits humains, les membres du Parlement doivent rejeter toute nouvelle demande de prorogation faite par le gouvernement », a déclaré Tigere Chagutah.

Malgré l’état de siège, l’armée de la RDC n’a pas réussi à prévenir les attaques croissantes des groupes armés contre la population civile ni à y apporter une réponse adéquate. Selon les informations recueillies par le Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme en République démocratique du Congo [2] (BCNUDH), l’armée est en fait responsable de violations graves des droits humains à l’encontre des civil·e·s.

Amnesty International a précédemment relevé que les autorités militaires de la RDC, nommées par le président Félix Tshisekedi, ont utilisé les pouvoirs conférés par l’état de siège pour restreindre systématiquement les droits humains. Elles ont harcelé et incarcéré des journalistes, et tué des défenseur·e·s des droits et des militant·e·s politiques. Elles ont également recouru à la détention provisoire massive des personnes considérées comme une menace, dans des centres où les conditions sont bien souvent épouvantables.

« Toutes les personnes détenues arbitrairement dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, y compris au seul motif qu’elles ont critiqué l’état de siège et l’armée, doivent être libérées immédiatement. Tous les membres des forces de sécurité de la RDC soupçonnés d’avoir bafoué les droits humains doivent être traduits en justice dans le cadre de procès équitables, a déclaré Tigere Chagutah.

« Les autorités de la RDC doivent prendre des mesures sur-le-champ afin de garantir une franche amélioration des conditions carcérales. Les détenus doivent avoir accès à des aliments nourrissants, à de l’eau propre, à des installations sanitaires et à des soins médicaux. »

Au lieu de réprimer davantage les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique, le gouvernement en RDC doit permettre à la population d’exercer librement ses droits et trouver des mesures efficaces pour résoudre les problèmes de sécurité, à l’approche des élections générales prévues en décembre 2023.

« En consultation avec les populations touchées et les organisations de la société civile, il doit définir et mettre en œuvre des mesures efficaces de protection des civils et améliorer la sécurité, sans écorner davantage les droits humains », a déclaré Tigere Chagutah.

Complément d’information

Le président Félix Tshisekedi a instauré l’« état de siège » dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri à partir du 6 mai 2021. Affirmant qu’il s’agissait d’une mesure radicale mais nécessaire pour juguler rapidement les groupes armés et rétablir la sécurité, il a considérablement restreint les droits humains et ordonné aux tribunaux militaires de poursuivre des civils. Il a nommé des membres de l’armée et de la police pour remplacer l’administration civile, y compris les gouverneurs élus, et a suspendu les assemblées provinciales élues.

La Constitution de la RDC définit l’état de siège comme une mesure exceptionnelle et provisoire pouvant être décrétée pour une période initiale de 30 jours. Si le Parlement ratifie une prolongation, celle-ci peut être renouvelée par périodes successives de 15 jours.

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel la RDC est partie, autorise les États à déroger à certaines dispositions relatives aux droits humains, mais dans le respect de certaines exigences : ils doivent notamment notifier par écrit le Secrétaire général des Nations unies et expliquer les circonstances justifiant toute dérogation. Or, les autorités de la RDC n’ont pas respecté cette exigence.

La Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, à laquelle la RDC est également partie, ne permet en aucun cas de déroger à l’une quelconque de ses dispositions.

L’état de siège ne doit pas non plus servir de prétexte pour réprimer les droits humains.

« L’état de siège est illégal et contribue à aggraver la situation des droits humains dans le pays. Le président Félix Tshisekedi doit lever cette mesure répressive sans délai »

Les autorités de la République démocratique du Congo (RDC) doivent garantir les droits à la liberté de réunion pacifique, d’association et d’expression lors du deuxième jour de la nouvelle vague de manifestations dans l’est de la RDC contre la mission de maintien de la paix de l’ONU, le maintien de l’état de siège et la résurgence du groupe armé Mouvement du 23 mars (M23).

Les autorités ont menacé de réprimer la dernière manifestation en date organisée dans la province du Nord-Kivu, qui a débuté le 26 septembre 2022 et qui dénonce l’occupation persistante de Bunagana, dans l’est de la RDC, par le groupe armé M23. Les manifestant·e·s demandent également aux autorités de lever l’état de siège et appellent au retrait de la mission de maintien de la paix présente dans le pays.

Le maire de Goma, un militaire qui fait l’objet de trois plaintes au pénal liées à la répression de manifestations pacifiques, a qualifié les organisateurs de « fauteurs de troubles » et les a menacés d’arrestation et de poursuites.

« Depuis l’instauration de l’état de siège en mai 2021, il est particulièrement dangereux de demander des comptes aux autorités dans les deux provinces concernées. Des dizaines de personnes ayant critiqué l’état de siège ont été arrêtées de façon arbitraire, et parfois poursuivies devant des juridictions militaires. Les autorités militaires doivent cesser d’utiliser l’état de siège comme prétexte pour réprimer les voix dissidentes, a déclaré Muleya Mwananyanda, directrice régionale pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe à Amnesty International.

« Le président Félix Tshisekedi doit traduire dans les faits ses engagements répétés en faveur de la protection des droits humains. Afin de protéger l’espace civique, il doit ordonner la levée des interdictions générales de manifester décrétées par des gouverneurs et des maires à travers le pays, notamment dans les provinces soumises à l’état de siège.

« À l’approche des élections de 2023, il est essentiel que le gouvernement prenne les mesures nécessaires pour respecter, protéger et mettre en œuvre les droits humains, notamment la liberté d’association et de réunion pacifique, conformément aux normes régionales et internationales », a souligné Muleya Mwananyanda.

Amnesty International demande au gouvernement de la RDC de veiller à ce que toutes les personnes responsables d’agissements illégaux commis dans le cadre de la répression des manifestations soient amenées à rendre des comptes, et à ce que justice soit faite pour les victimes.

Informations complémentaires

Le président Félix Tshisekedi a déclaré l’état de siège (similaire à l’état d’urgence) dans les provinces orientales du Nord-Kivu et de l’Ituri en mai 2021. Il a remplacé les autorités civiles par des autorités militaires et de la police, qui se sont vu octroyer des pouvoirs extraordinaires, notamment le pouvoir de restreindre les libertés et de poursuivre des civil·e·s devant des tribunaux militaires, en violation du droit international et des normes internationales.

Cette mesure, qui devait être de courte durée, a depuis été reconduite une trentaine de fois et elle risque de devenir permanente, alors même qu’elle ne permet pas d’améliorer la situation en ce qui concerne la sécurité. Bien au contraire, les groupes armés ont intensifié leur activité dans la région et le nombre de victimes civiles a plus que doublé depuis un an et demi, comme le montrent les données du Baromètre sécuritaire du Kivu.

Parallèlement à cela, l’état de siège est utilisé par les autorités militaires et de la police nommées par le président, et responsables devant lui, pour étouffer les critiques, notamment avec l’arrestation et l’emprisonnement de militant·e·s de la société civile et de l’opposition, comme l’a montré Amnesty International.

La semaine dernière, des groupes de la société civile dans le Nord-Kivu ont appelé la population de Goma et d’autres villes de la province à mener pendant deux jours, les 26 et 27 septembre, une opération « ville-morte » pour protester contre l’occupation de Bunagana par le M23 depuis le mois de juin, selon elle avec le soutien du Rwanda – une affirmation confirmée [1] par un rapport datant de juin du groupe d’experts des Nations unies –, et pour réclamer la levée de l’état de siège et le retrait de la MONUSCO, la mission de maintien de la paix de l’ONU en RDC.

Les autorités de la RDC prennent de façon croissante des mesures pour étouffer la dissidence et arrêter de façon arbitraire des militant·e·s de la société civile et de l’opposition sur la base d’accusations sans fondement, anéantissant ainsi tout espoir de voir la situation des droits humains s’améliorer dans le pays après le départ de l’ancien président Joseph Kabila, en janvier 2019.

Il y a deux mois, des violences ont eu lieu lors d’importants mouvements de protestation dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, qui ont entraîné la mort de 32 manifestant·e·s et passant·e·s, et de quatre membres de la mission de maintien de la paix de l’ONU. Les enquêtes sur ces événements promises par les autorités et par l’ONU ne sont toujours pas terminées.

Le droit de manifester est menacé dans toutes les régions du monde. La nouvelle campagne mondiale d’Amnesty International intitulée Protégeons les manifs a pour objectif de dénoncer les attaques contre les manifestations pacifiques, de défendre les personnes visées et de soutenir les causes portées par les mouvements sociaux en faveur de changements dans le domaine des droits humains.

Lors des opérations de maintien de l’ordre en cas de rassemblements, les forces de sécurité ont l’obligation de ne causer que le minimum de dommages et d’atteintes à l’intégrité physique, de préserver la vie humaine et de faire preuve de retenue dans leur usage de la force. Les agents chargés de l’application des lois ne doivent employer la force que si aucun autre moyen ne leur permet d’atteindre leurs buts légitimes, et que si le recours à la force est nécessaire et proportionné à la situation.

AMNESTY INTERNATIONAL & BIENVENU MASSAMBA MP

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