M. Tshisekedi a été proclamé jeudi vainqueur de la présidentielle, avec 38,57% des voix, par la Commission électorale nationale indépendante (Céni), une victoire contestée devant la Cour constitutionnelle par son principal rival, Martin Fayulu Madidi (34,8%).

 
 
 

Mais M. Fayulu a dénoncé vendredi un "putsch électoral" du président sortant Joseph Kabila Kabange avec la "complicité" de M. Tshisekedi, et revendiqué la victoire avec 61% des voix.

"Il y a eu vote, qui donne une orientation, mais c'est Joseph Kabila qui choisit le vainqueur", a affirmé le professeur à l'université de Kinshaa, Jean Omasombo, dans une interview publiée samedi par La Libre Belgique. Il accrédite ainsi la thèse de résultats imposés à la Céni en vertu d'un accord Kabila-Tshisekedi associant également Vital Kamerhe, un député coutumier d'allers-retours entre majorité et opposition, au point de lui valoir le surnom de "caméléon".

La puissante Conférence nationale épiscopale du Congo (Cenco) a pour sa part affirmé par la voix de son président, Mgr Marcel Utembi Tapa, que "les résultats (tels que publiés par la Céni), ne correspondent pas aux données collectées par la mission d'observation de la Cenco". Elle a aussi demandé vendredi à l'ONU de faire publier les procès-verbaux du scrutin présidentiel controversé du 30 décembre.

Les résultats des législatives, publiés dans la nuit de vendredi à samedi, donnent près de 350 sièges de députés à l'Assemblée nationale - qui compte 500 élus de 181 circonscriptions, mais quinze d'entre eux restent à élire dans les régions en crise où tous les scrutins ont été reportés au mois de mars - pour la coalition Front commun pour le Congo (FCC) du président sortant Joseph Kabila.

La coalition Cap pour le changement (Cach) de M. Tshisekedi, alias "Fatchi", vainqueur de la présidentielle, n'a obtenu - étrangement, soulignent des observateurs - qu'une cinquantaine des 485 sièges mis en jeu. La coalition Lamuka de l'autre opposant, plus radical, Martin Fayulu compte quelque 80 députés.

Aux provinciales, dont les résultats ont été annoncés avant la fin de la "compilation" des votes, le FCC a remporté plus de 80% des sièges dans 22 des 26 provinces, ce qui lui assure une large majorité au Sénat - les 108 sénateurs sont élus au second degré par les 26 assemblées provinciales.

Or, M. Kabila, qui ne pouvait briguer de troisième mandat, deviendra après la prestation de serment de son successeur, sénateur à vie, selon la Constitution de 2006.

Fort de sa confortable majorité, il pourrait, spécule-t-on à Kinshasa, briguer la présidence du Sénat et devenir ainsi protocolairement le second personnage de l'Etat et, en cas d'empêchement définitif du chef de l'Etat (a priori M. Tshisekedi), les "fonctions de Président de la République", comme le stipule la Constitution.

Une hypothèse qui circule en RDC est que le dauphin de M. Kabila, Emmanuel Ramazani Shadary - le grand perdant de la présidentielle avec 23%, selon les résultats provisoires de la Céni - soit nommé Premier ministre.

Le futur chef du gouvernement devra en effet être choisi parmi les forces fidèles à son prédécesseur car issu de la majorité parlementaire.

"Le nouveau chef de l'Etat (Félix Tshisekedi) régnera mais ne gouvernera pas", en conclut le professeur Omasombo. "L'Assemblée nationale et le Sénat seront kabilistes, comme le gouvernement et l'armée", a-t-il ajouté.

"Felix Tshisekedi sera un président sans pouvoir. Un président fantoche. Kabila lui a cédé la présidence tout en conservant l'effectivité du pouvoir", a pour sa part commenté l'avocat Guylain Mafuta Laman, un ex-proche de Fatshi.